Chers amis, 

Dans les médias, on entend toujours parler de deux catégories de patients-Covid : 

  • les personnes qui ont des symptômes graves, hospitalisées, souvent âgées ;
  • les personnes qui ont des symptômes légers (voire pas de symptôme du tout), en bonne santé, souvent jeunes. 

On ne parle presque jamais d’une troisième catégorie : les personnes qui ont toujours des symptômes du Covid après 20 jours, les “Covid-long”. 

Le Covid-long est maintenant connu des médecins. Les symptômes du Covid-long sont aussi variés que ceux du Covid « classique », si j’ose dire. Ils durent simplement… plus longtemps. 

Ces symptômes peuvent affecter le système respiratoire, les fonctions cognitives, voire certains organes comme le cœur ou les poumons. 

Beaucoup de personnes se plaignent de ressentir une fatigue excessive, un essoufflement à l’effort, des troubles visuels et de la concentration ou de la persistance de la perte de goût et d’odorat survenus durant la maladie. 

D’autres souffrent de douleurs articulaires, de troubles du rythme cardiaque, ou encore de maux de tête.

La liste est aussi longue qu’énigmatique.

D’autant plus qu’à ce jour, il n’existe aucun traitement de fond, sur la durée, pour ces troubles.

La double peine des « Covid longs »

Les patients qui développent immédiatement des symptômes « classiques » sont protégés. Ceux ayant peu de symptômes mais contagieux sont isolés.

Les personnes atteintes de Covid long sont, elles, dans un « entre-deux » angoissant.

Elles ne sont ni prises en charge… ni prises en compte dans le débat public.

La mère de l’un de mes amis souffre d’un « Covid-long » depuis plusieurs semaines. Elle qui était en pleine forme à près de 80 ans et faisait plusieurs kilomètres à pied chaque jour, est devenue (l’expression est de son fils) « une mémé » incapable de se déplacer seule. 

Au drame de sa perte d’autonomie s’ajoute le désarroi de l’errance médicale dans laquelle cette maladie mal connue la plonge.

Sans doute vous dites-vous que ça ne concerne qu’une poignée de Français ?

Détrompez-vous.

400 000 ou 1 400 000 français ?

Le 15 mars dernier, interrogé par la journaliste Léa Salamé sur la situation dans les hôpitaux, Bruno Riou, directeur médical de crise de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, poussait un cri d’alarme[1] : 

“La situation n’est pas encore hors de contrôle, mais elle va l’être” 

La cause de son inquiétude était, justement, le nombre de Covid-longs.

Selon lui, “400 000 Français vont avoir” le Covid-long.

Pour obtenir ce chiffre, Bruno Riou a pris la fourchette basse du chiffre officiel, celui donné par la Haute autorité de santé, qui estime à 10-15% le nombre de Covid-longs.

Puis il a pris le nombre de contaminations officielles, qui est de 4 millions actuellement. Il a ensuite fait le calcul suivant : 10% de 4 millions, cela donne effectivement 400 000.

Par contre, mauvaise nouvelle…

Ce chiffre de 10-15% de Covid-long, donné par la Haute autorité de Santé, est obsolète.

Car il s’appuie sur le résultat d’une étude menée par l’ONS, un institut de sondage (l’équivalent de l’IFOP en France) en Angleterre publiée le 16 décembre dernier[2].

L’enquête concluait ceci : “la persistance de symptômes apparus en mars concernait 20% des patients après 5 semaines et plus et 10% des patients après 3 mois.”

Les chercheurs qualifiaient eux-mêmes leur travail de “première tentative d’estimation, amenée à évoluer” et notaient deux faiblesses dans leur méthodologie : 

  • L’enquête ne tient pas compte du nombre de personnes ayant un Covid-long au-delà de 3 mois ;
  • Les outils statistiques utilisés n’étaient pas assez précis.

De nouvelles études alarmistes

D’autres études récentes menées dans d’autres pays estiment le nombre de patients Covid-long plus nombreux, et que la durée de leurs symptômes s’allonge :

  • Une étude parue le 22 mars 2021 dans la revue Nature Medecine, et qui fait la synthèse de travaux antérieurs, indique qu’au moins 1 malade sur 3 voit sa santé affectée de façon durable[3] ;
  • Aux États-Unis, le célèbre immunologiste Anthony Fauci estime que 25% à 35% des patients atteints de Covid-19 garderont des symptômes sur le long terme (au-delà de trois mois)[4] ;
  • L’étude la plus complète menée en Suisse par l’Université de Zurich indique que 26% des personnes ne sont pas complètement rétablies six mois après leur infection au Covid-19[5].

Si on prend le chiffre haut de 35%, ce serait non pas 400 000 mais 1 400 000 Français qui pourraient développer un Covid-long. 

L’étonnant profil des “Covid-longs” 

Parmi les Covid-long, on retrouve une proportion élevée de personnes âgées, de personnes en surpoids, et de personnes qui avaient 5 symptômes ou plus lorsqu’ils ont eu le Covid pour la première fois[6].

Mais aussi une large proportion de femmes.

Une étude menée par le Dr Claire Steves, du King’s College de Londres a démontré que les femmes seraient plus susceptibles de développer un Covid-long que les hommes[7].

Plus surprenant, contrairement à ce que pensaient au départ les scientifiques, ce ne sont pas uniquement les personnes avec des symptômes graves qui développent le Covid long[8].

Une large proportion de personnes jugées peu vulnérables en sont également atteintes. C’est ce qui ressort d’un suivi effectué depuis mars 2020 en Suisse, auprès de 700 personnes ayant eu un Covid léger, sans facteurs de risques sous-jacents. Six semaines après le diagnostic, 33% d’entre elles souffraient encore de fatigue, de perte d’odorat et du goût, ou encore d’essoufflement et de toux[9]. 

Et ce phénomène pourrait même concerner les personnes asymptomatiques. 

Une étude récente menée sur 1407 patients affirme que même les patients asymptomatiques au moment du Covid peuvent développer le Covid-long[10]. 

Parue dans la revue medRxiv, l’étude montre que 382 personnes sur les 1407 patients ont encore des séquelles du Covid, 60 jours après l’infection. Parmi ces 382 personnes, 1/3 étaient asymptomatiques selon l’étude. Ils auraient donc développé des symptômes à retardement. Mais ceci reste à confirmer.

Et ça s’arrête quand ?[11]

Hypothèse 1 : le Covid-long s’estompe progressivement

A ce jour, on n’a aucune idée de la durée des symptômes du Covid-long.

Une hypothèse défendue par certains scientifiques est que chez la majorité des personnes, le Covid-long s’estompe avec le temps.

Les patients alterneraient des périodes symptomatiques avec des périodes de rémission. La durée de ces périodes varierait selon chaque individu.

L’état des patients s’amélioreraient un peu plus, à mesure que les « vagues » passent.

Hypothèse 2 : le Covid-long agit comme une maladie auto-immune

Dans l’hypothèse quasi-inverse, le Covid long est chronique, et pourrait s’installer durablement. 

Cette hypothèse est soutenue par une découverte récente : des chercheurs ont trouvé des « auto-anticorps » chez les malades[12].

Les auto-anticorps sont connus pour être impliqués dans les maladies auto-immunes, telles que la polyarthrite rhumatoïde et le lupus.

Si vous souffrez de Covid-long, au lieu d’attaquer le virus, ces auto-anticorps se mettraient à attaquer votre organisme, ce qui pourrait expliquer tous les symptômes rapportés par les malades.

Ces auto-anticorps vont ensuite s’accrocher à des protéines cruciales du système immunitaire (les cytokines, les chimiokines et les interférons) impliquées dans la reconnaissance, l’alerte et l’élimination des cellules infectées par le coronavirus.

Cela va empêcher ces protéines de faire leur travail, interférer avec le fonctionnement normal du système immunitaire, bloquer les défenses antivirales et rendre potentiellement la maladie plus grave.

Dans ce cas de figure, on n’a aucune idée de la durée.

Vers une meilleure compréhension du Covid-long

Des études sont menées en ce moment en France, visant à mieux comprendre le Covid-long :

  • Au centre hospitalier de Tourcoing, une étude baptisée Cocolate (pour Coordination sur le Covid tardif) a été lancée en décembre, et espère inclure un millier de patients de toute la France[13].
  • Depuis fin octobre, l’AP-HP, qui rassemble les 39 hôpitaux d’Île-de-France, a lancé une plateforme collaborative, ComPaRe (Communauté des Patients pour la Recherche). 600 patients ont rapporté des troubles neurologiques, digestifs, ORL ou gynécologiques qui les handicapent toujours plus ou moins lourdement, au moins trois semaines après leur contamination[14].
  • Jeudi 25 février, l’OMS Europe a appelé les pays et les institutions européennes à mettre en place « un programme de recherche commun pour le Covid-long», avec une collecte harmonisée des données[15]. 

Ce n’est pas tout. Depuis un mois, des associations de patients, dont la plus connue est #ApresJ20 – Association Covid Long France se battent pour faire reconnaître la maladie.

Et ça y est ! Depuis quelques semaines, l’Assemblée nationale, la Haute Autorité de santé et le ministère de la Santé ont enfin reconnu le Covid-long comme une pathologie.

Avec des critères précis toutefois : il faut avoir au moins un des symptômes initiaux, au-delà de quatre semaines suivant le début de la phase aiguë de la maladie – des symptômes initiaux et prolongés non expliqués par un autre diagnostic sans lien connu avec le Covid-19.

Comme pour la maladie de Lyme chronique, qu’on peut développer des mois, des années, après une morsure de tique, le lien de causalité avec le Covid est… très difficile à prouver.

J’ai récemment lu le témoignage d’une gynécologue[16] qui raconte que plusieurs mois après l’infection, elle était essoufflée, anormalement fatiguée, dépressive, et pensait souffrir de Covid-long. Son pneumologue lui a répondu « le scanner des poumons et tous les autres examens sont normaux, à mon avis vous somatisez ».

Quand on y réfléchit, le Covid long est très similaire à la maladie de Lyme ou même à la fibromyalgie.

Des symptômes inexpliqués, protéiformes, une difficulté à poser un diagnostic, des patients pris pour des fous.

Heureusement, comme pour la maladie de Lyme, certaines solutions naturelles peuvent venir soulager certains symptômes, comme atténuer les maux de tête.

  1. Surveillez vos niveaux de vitamine D

La vitamine D, essentielle au système immunitaire, est reconnue aussi pour son action anti-infectieuse. Un dosage sanguin permet de contrôler une carence souvent présente chez les malades de Lyme.

  1. Faites attention à ces vitamines et minéraux

Les vitamines B et C, le zinc, le magnésium sont indiqués et peuvent améliorer un traitement[17]. Les compléments riches en fer sont à éviter[18], sauf en cas de carence, car beaucoup de bactéries en ont besoin pour leur métabolisme.

  1. Prenez soin de votre flore intestinale

Les patients atteints de maladies chroniques peuvent avoir des soucis de dysbiose intestinale liés à la prise d’antibiotiques. De plus, une exacerbation de leur système immunitaire induit une perméabilité intestinale qui peut être la cause d’intolérance au gluten par exemple.

Ces troubles peuvent être réduits en modifiant et corrigeant son alimentation. Il est par exemple recommandé de diminuer sa consommation de sucres rapides, de caféine et d’alcool.

Portez-vous bien,

Rodolphe


[1] France Inter. L’invité de 7h50 : Bruno Riou. https://www.franceinter.fr/emissions/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-15-mars-2021

[2] Office of National Statistics. The prevalence of long COVID symptoms and COVID-19 complications. https://www.ons.gov.uk/news/statementsandletters/theprevalenceoflongcovidsymptomsandcovid19complications

[3] Nalbandian, A., Sehgal, K., Gupta, A. et al. Post-acute COVID-19 syndrome. Nat Med (2021). https://doi.org/10.1038/s41591-021-01283-z

[4] Swissinfo. Les malades du Covid-long se battent pour obtenir aide et reconnaissance. https://www.swissinfo.ch/fre/politique/pand%C3%A9mie-en-suisse_les-malades-du-covid-long-se-battent-pour-obtenir-aide-et-reconnaissance/46282584

[5] RTS. Le Covid long, un mal mystérieux qui toucherait un quart des malades. https://www.rts.ch/info/suisse/12008915-le-covid-long-un-mal-mysterieux-qui-toucherait-un-quart-desmalades.html#:~:text=En%20incluant%20le%20nombre%20de,par%20le%20%22Covid%20long%22.

[6] The Conversation. Covid de longue durée : qui est à risque ? https://theconversation.com/covid-19-de-longue-duree-qui-est-a-risque-152956#:~:text=De%20fait%2C%20une%20analyse%20pr%C3%A9liminaire,r%C3%A9pondants%20pr%C3%A9sentaient%20encore%20des%20sympt%C3%B4mes

[7] BBC. Covid long : quelles sont les personnes les plus à risque. https://www.bbc.com/afrique/monde-54632317

[8] Futura Sciences. Covid long : quelles sont les personnes les plus à risques. https://www.futura-sciences.com/sante/actualites/pandemie-covid-long-sont-personnes-plus-risque-82241/

[9] Carfì A ,  Bernabei R ,  Landi F ; Gemelli Against COVID-19 Post-Acute Care Study Group. Persistent symptoms in patients after acute COVID-19. JAMA. 2020;324:603-605. [PMID: 32644129] doi:10.1001/jama.2020.12603

[10] COVID Symptoms, Symptom Clusters, and Predictors for Becoming a Long-Hauler: Looking for Clarity in the Haze of

the Pandemic Yong Huang, Melissa D. Pinto, et al., A. Downs medRxiv 2021.03.03.21252086; doi: https://doi.org/10.1101/2021.03.03.21252086

[11] Après 20 jours. Qu’est-ce-que le Covid long ? https://www.apresj20.fr/covid-long-quest-ce-que-c-est

[12] Covid long. La piste des auto-anticorps. https://www.larevuedupraticien.fr/article/covid-long-la-piste-des-autoanticorps

[13] Cocolate, une étude coordonnée depuis Tourcoing pour comprendre le Covid. https://www.lefigaro.fr/flash-actu/cocolate-une-etude-coordonnee-depuis-tourcoing-pour-comprendre-le-covid-long-20201204

[14] ComPaRe. https://compare.aphp.fr/

[15] RTBF : OMS, le Covid long doit être notre priorité. https://www.rtbf.be/info/dossier/epidemie-de-coronavirus/detail_oms-le-covid-long-doit-etre-une-priorite-pour-les-autorites-sanitaires?id=10705759

[16] L’avventura. 07.01.2021. Après le Covid, c’est encore le Covid : le virus insidieux. Le monde. https://www.lemonde.fr/blog/lavventura/2021/01/07/apres-la-covid-cest-encore-la-covid-le-virus-insidieux/

[17]. Lacout, Mas, Raymond, Lyme Pratique, VG Editions, 2019

[18]. Jean-Paul Curtay, « Il faut manier le fer avec précaution », in Lanutrition.fr, publié le 19 octobre 2011, mis à jour le 26 septembre 2017, consulté le 20 mars 2020, disponible sur : https://www.lanutrition.fr/bien-dans-sa-sante/les-complements-alimentaires/les-risques-lies-aux-complements-alimentaires/jean-paul-curtay-qil-faut-manier-le-fer-avec-precautionq