Le venin d’abeille, une thérapie naturelle musclée

Chers amis,

Quand on pense « apithérapie », on pense d’abord au miel, ensuite au pollen, à la cire, à la gelée royale, à la propolis.

Chacun de ces produits a des propriétés fabuleuses.

Il existe cependant une autre méthode d’apithérapie, disons… plus musclée

C’est la thérapie au venin d’abeille.

Les piqûres d’abeille, nous souhaitons les éviter d’instinct. À raison : c’est douloureux.

Mais, dans un cadre thérapeutique, ses résultats sont impressionnants.

C’est une méthode de santé « naturelle »… pas « douce » du tout, ni dépourvue d’effets secondaires !

La thérapie au venin d’abeille est un traitement de choc contre des maladies lourdes.

On trouve, parmi ses indications l’arthrite aiguë ou chronique, la sciatique, la polyarthrite, la spondylarthrite ankylosante, la sclérose en plaques, certaines tumeurs cancéreuses, les migraines, etc. 


Mais d’autres pays en font une utilisation bien plus large, que je vais vous décrire.En France, le venin d’abeille est utilisé en milieu hospitalier pour désensibiliser les personnes allergiques.

Le venin d’abeille, un concentré d’huiles essentielles !

Un spécialiste de ces thérapies, le Pr Roch Domerego qui vit et travaille aujourd’hui près de Digne-les-Bains, dans les Alpes de Haute Provence, y a consacré un ouvrage entier[1]. Il est assez technique, mais passionnant.

Il y détaille la composition du venin d’abeilles ; j’ai appris à cette occasion que c’est un concentré d’huiles essentielles !

On y trouve notamment :

  • Des cétones, cicatrisants et mucolytiques (fluidifiant le mucus) ;
  • Des aldéhydes, anti-infectieux et litholytiques (c’est-à-dire capable de dissoudre les calculs biliaires) ;
  • Des acides et phénols anti-infectieux et immunostimulants ; 
  • Des esters, antispasmodiques ;
  • Des sesquiterpènes polyinsaturés, anti-histaminiques et antiallergiques ;
  • Des terpènes, cortisone-like et antiseptiques.

Ce n’est qu’un aperçu.

Le plus important est ceci : le venin d’abeille a de puissantes propriétés anti-inflammatoires et renforce le système immunitaire.

D’où ses deux « terrains » privilégiés, souvent superposés : les maladies chroniques et inflammatoires.

Traitement de choc contre les douleurs articulaires

Historiquement, la première indication du traitement au venin d’abeille est articulaire.

Les célèbres médecins de l’antiquité, Hippocrate, Celse et Galien l’indiquaient déjà dans leurs traités, et l’on raconte que les empereurs Charlemagne et Ivan le Terrible l’employaient contre leurs crises de goutte[2].

Pour l’arthrose et toutes les pathologies rhumatismales, la technique employée est on ne peut plus simple : il s’agit de provoquer des piqûres d’abeille sur la ou les zones concernées.

Cette technique peut sembler folle, voire barbare (je vais y revenir un peu plus en détail dans un instant) : elle est pourtant appliquée depuis au moins 2000 ans avec succès et est abondamment employée aujourd’hui en Chine.

Dans les problèmes articulaires, il y a souvent une problématique de circulation et de ralentissement du métabolisme. Or, le venin d’abeille provoque une phase inflammatoire aiguë qui va réactiver la circulation, le métabolisme et l’efficacité du système immunitaire[3].

Il ne s’agit ni d’une panacée ni d’un traitement unique.

 Mais ces séances de piqûres d’abeille ont, semble-t-il, la vertu d’apaiser durablement les douleurs articulaires.

Elles ne se font pas à la légère. Il s’agit de déterminer précisément :

  • la quantité de séances,
  • le nombre de piqûres,
  • le périmètre à piquer (ce qu’on appelle le « zoning »)
  • mais aussi la durée de piquage (entre 10 secondes et 2 minutes).

Cette précision est possible car l’apithérapeute :

  • soit applique l’abeille elle-même sur la zone à piquer (photo ci-dessus) ;
  • soit a au préalable séparé le dard ainsi que la glande contenant le venin, de l’abdomen de l’abeille (photo ci-dessous).





Vous le savez, contrairement à une guêpe ou un frelon, quand une abeille nous pique, elle y laisse son dard – où la glande qui contient le venin continue à s’écouler pendant plusieurs secondes – ainsi qu’une partie de son intestin : elle meurt donc rapidement après la piqûre.

Le praticien place donc ainsi directement le dard prélevé sur la zone à piquer, comme on le ferait avec une aiguille d’acupuncture, au moyen d’une sorte de petite pince à épiler.

Protocoles d’apipuncture

Comme l’on pique des points précis du corps non pas avec des aiguilles… mais avec des dards d’abeille, on parle pour ces thérapies d’apipuncture.

C’est un néologisme qui croise l’apithérapie (à base d’abeilles) et l’acupuncture (héritée de la médecine traditionnelle chinoise).

Ça n’est évidemment pas quelque chose à faire seul chez soi dans son jardin : il y a des principes capitaux (comme laisser la zone s’enflammer avant de retirer l’aiguillon, et ne jamais piquer une zone déjà enflammée) et des protocoles très précis, que seul un praticien formé à l’apipuncture pourra correctement observer.

Afin d’éviter la mort de l’abeille, certains praticiens emploient des alternatives comme des venins reconstitués ou des grilles pour éviter de tuer les abeilles : dans ce dernier cas, l’ouvrière ne peut pas enfoncer son dard trop profondément et repart donc.

Ces alternatives sont intéressantes pour l’abeille… mais pas du point de vue thérapeutique, selon le Pr Domerego :

  • Les venins reconstitués sont moins efficaces que les venins vivants car c’est l’interaction, encore mal comprise, entre les 700 à 800 molécules qui les constituent, qui fait son efficacité ;
  • La piqûre effectuée à travers une grille est beaucoup moins chargée en venin, et donc moins efficace.

Pour être bien pratiquée, l’apipuncture demande donc de tuer des abeilles vivantes, mais, d’une part, souligne le Pr Domerego, les 20 à 30 abeilles utilisées par séance ne mettent pas en péril une colonie : il naît chaque jour, en saison, entre 1500 et 2000 abeilles par jour[4].

D’autre part, les abeilles prélevées mais non tuées sont affaiblies et désorientées pendant une semaine, ce qui n’est pas mieux.

Dans tous les cas il s’agit d’une thérapie à réserver aux maladies chroniques lourdes. Et c’est le cas avec la sclérose en plaques.

Ralentissements spectaculaires de scléroses en plaques

La sclérose en plaques est une maladie auto-immune incurable : la seule chose que l’on puisse faire, c’est ralentir sa progression et apaiser les poussées.

C’est probablement aujourd’hui la maladie pour laquelle l’apipuncture est la plus demandée : aux États-Unis, on l’emploie à haute dose dans le cadre d’un protocole très précis, le « Protocole Pat Wagner », qui s’étale sur plusieurs semaines.

Jusqu’à 200 piqûres pour une seule séance !

Mais, écrit le Pr Domerego, « il n’est pas rare de voir des patients jusque-là condamnés au fauteuil roulant se remettre à marcher au cours du traitement.[5] »

Si vous-même êtes atteint de sclérose en plaques ou connaissez quelqu’un l’étant, je vous invite sans délai à lire l’ouvrage du Pr Domerego : il détaille longuement ces protocoles pp.63 à 82.

Bientôt le cancer, Alzheimer, Parkinson et le sida traités au venin d’abeille ?!

La recherche s’intéresse de plus en plus au venin d’abeille.

En 2010, une étude coréenne a constaté la régression de 49 à 62% de tumeurs dans la sphère hépatique ou pulmonaire suite à des traitements au venin d’abeille dans des modèles animaux[6], doublant même le taux moyen de survie.

Entre 2008 et 2012, des recherches menées à Taiwan et à Zagreb ont conclu que le venin d’abeille permet de rétablir l’apoptose des cellules cancéreuses (autrement dit : leur autodestruction)[7]. 

En 2015, une étude révélait qu’une neurotoxine du venin d’abeille, l’apamine, intensifie l’activité et la sécrétion des neurones à dopamine, ce qui la rendrait intéressante contre… Parkinson, caractérisé par la dégradation de ces mêmes neurones (ce qui crée les troubles moteurs symptomatiques de la maladie)[8].

En 2018, une étude « confirmait » son efficacité notamment dans le traitement de l’arthrose du genou et de la polyarthrite rhumatoïde, mais aussi des AVC, de Parkinson et de la dépression[9].

En Russie, un service de psychiatrie s’en sert d’ailleurs pour diminuer l’addiction aux drogues.

En 2019, une autre étude allait encore plus loin, y trouvant un traitement d’avenir (en plus de la sclérose en plaques et de Parkinson, dont nous avons déjà parlé) contre Alzheimer, certains cancers et même le sida[10].

Enfin, le venin d’abeille facilite également le processus de cicatrisation : il aide à la revascularisation des plaies mortifiées (où le sang ne circule plus) et soulage les douleurs provoquées par les chéloïdes (des excroissances fibreuses) sur les cicatrices importantes.

Qui peut suivre des traitements au venin d’abeille ?

Vous comprenez, en me lisant, que la thérapie au venin d’abeilles est à réserver à des maladies les plus sérieuses.

Néanmoins, même si c’est votre cas, je comprends que vous soyez assez réticent : on a d’emblée tendance à considérer les piqûres d’abeille comme dangereuses.

Le venin d’abeille est, c’est vrai, une toxine, un poison.

Par contre il faudrait une injection de 200 milligrammes pour tuer un homme de 70 kilos[11]. Une piqûre diffusant 150 microgrammes de venin, notre homme de 70 kilos devrait donc se faire piquer 1400 fois pour être réellement en danger ! Et encore connaît-on des cas d’hommes, en Afrique, s’étant fait davantage piquer qui ont survécu !

Dans le cas du venin d’abeille comme pour bien d’autres substances, c’est la dose qui fait le poison : à petite dose, le venin d’abeille est bel et bien un formidable (et très puissant) médicament.

Il faut signaler deux cas importants de contre-indications.

Le premier, c’est évidemment l’allergie. Une réaction anaphylactique à une piqûre d’abeille peut en avoir des conséquences dramatiques.

Mais d’une part, si vous êtes allergique au venin d’abeille, vous le savez sans doute déjà, et d’autre part, tout praticien d’apithérapie (je vais y revenir dans un instant) prend le soin de vérifier que votre « terrain » est dégagé.

Mais, même en cas d’allergie, il est possible de se faire désensibiliser au préalable.

Le second, c’est la prise régulière d’antiinflammatoires comme l’ibuprofène, qui augmente le risque d’allergie[12], ainsi que plusieurs comorbidités comme les insuffisances cardiaques et/ou pulmonaire, et la cirrhose du foie.

D’où, une fois encore, l’importance de bien étudier la possibilité d’une telle thérapie avec un professionnel. 

Comment faire ?

En France, certains médecins pratiquent, malgré tout, l’apipuncture.  Je dis « malgré tout » car c’est surtout hors de France que cette pratique est répandue.

Le venin reconstitué n’étant pas encore commercialisé en France, ces médecins utilisent de vraies abeilles pour piquer les patients sur des points d’acupuncture.

Vous pouvez trouver sur le site de l’AFA[13] (Association Francophone d’Apithérapie) une liste de professionnels qui pratiquent l’apipuncture. Les médecins restent généralement discrets sur cette pratique… par peur de se faire radier de l’Ordre des médecins.

Il existe une dernière carte pour recourir au venin d’abeille, beaucoup plus douce : c’est l’homéopathie.

Il existe deux remèdes à base de venin d’abeille[14] :

  • Apis mellifica, fabriqué à partir d’une souche de broyat d’abeille entière, indiqué contre les douleurs rhumatismales mais aussi contre les otites de l’adulte comme de l’enfant. C’est un remède courant, utilisé le plus souvent pour soulager les crises aiguës ;
  • Apis inum, plus rare, qui est une dilution du venin, et qui est utilisée précisément pour désensibiliser le patient allergique au venin d’abeille, mais également contre les stress chroniques.

Le Pr Domerego l’a employé dans le cadre d’accompagnements des effets secondaires de chimiothérapie[15].

Si vous avez déjà eu recours au venin d’abeille pour traiter un problème de santé, je serais très curieux et heureux de lire le récit de votre expérience ici en commentaire !

Portez-vous bien,

Rodolphe


[1] Pr Roch Domerego, La thérapie au venin d’abeille, 2012, Baroch éditions, Digne-les-Bains

[2] Ibid., p.13

[3] Ibid., p.57

[4] Ibid., p.115

[5] Ibid., p.64

[6] Ibid., p.83

[7] Ibid., p.84

[8] Maurice, N., Deltheil, T., Melon, C., and al. (2015). Bee Venom Alleviates Motor Deficits and Modulates the Transfer of Cortical Information through the Basal Ganglia in Rat Models of Parkinson’s Disease. PloS One. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0142838

[9] Cherniack, E. P., & Govorushko, S. (2018). To bee or not to bee: The potential efficacy and safety of bee venom acupuncture in humans. Toxicon 154: 74-78. doi: 10.1016/j.toxicon.2018.09.013.

[10] Wehbe, R., Frangieh, J., Rima, M. et al. (2019). Bee Venom: Overview of Main Compounds and Bioactivities for Therapeutic Interests. Molecules. 24(16): 2997. doi: 10.3390/molecules24162997. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31430861/

[11] Pr Roch Domerego, La thérapie au venin d’abeille, 2012, Baroch éditions, Digne-les-Bains. Op. cit., p.27

[12] Ibid., p.58

[13] https://www.apitherapiefrancophone.com/

[14] Ibid., p.93

[15] Ibid., p.94