Chers amis,

Dans notre société vieillissante, nous assistons à l’essor d’une « médecine » qui prétend prolonger la vie humaine au moyen de techniques plus ou moins sérieuses.

Souvent appelée « médecine anti-âge », celle-ci laisse entendre que prendre de l’âge serait une maladie dont il faut guérir.

C’est à mes yeux un dangereux contresens. J’y reviendrai un peu plus loin.

Les adeptes de cette « médecine » ont déployé des trésors de méthodes futuristes pour réduire le vieillissement et prolonger la vie :

  • la supplémentation hormonale ;
  • le prolongement artificiel des télomères (les extrémités des chromosomes) ;
  • l’édition génique (modification de l’ADN)…

On est à mi-chemin entre la science et la science-fiction… Cela en fait rêver certains, mais aucune de ces solutions n’a prouvé son efficacité, ni son absence de dangers pour la santé.

Les inquiétantes dérives du « business anti-âge »

Il y a quelques années, un collectif de 52 éminents gérontologues du monde entier ont publié dans le Journal of Gerontology une mise en garde contre les mirages du « business de la médecine anti-âge »[1], devenu « une industrie multimillionnaire ».

Ils dénoncent, études à l’appui, que :

  • l’efficacité des « produits anti-âge » type crèmes anti-rides, etc., n’est pas prouvée scientifiquement[2];
  • certains des produits dans lesquels le public dépense de vastes sommes d’argent peuvent être dangereux pour la santé : les traitements anti-âge augmentent le risque de diabète et d’intolérance au glucose, l’hormone de croissance celui du cancer, et le traitement hormonal substitutif celui de démence, de cancer du sein, de maladies cardiovasculaires, et d’embolie pulmonaire[3];
  • rallonger les télomères (par l’activation de la télomérase) peut conduire à une prolifération cancéreuse des cellules de l’organisme[4];
  • compte tenu des spécificités génétiques de chacun, le calcul – et la modification – de l’âge biologique devraient être vus « comme un divertissement, et non une science[5]».

Bref, toutes les techniques scientifiques ultra-modernes que l’on nous présente pour rallonger la vie sont en réalité DU VENT.

Pourtant, il y a bel et bien quelque chose qui peut vous permettre de vivre plus longtemps et de vieillir en bonne santé.

Son efficacité a été prouvée scientifiquement.

Ce n’est ni un traitement hormonal, ni une opération chirurgicale, et certainement pas un cocktail de médicaments.

C’est l’Ikigaï.

L’Ikigaï réduit de moitié votre risque de mourir dans les 7 ans

Dans mon précédent message, je vous ai parlé de ces chercheurs américains qui ont « découvert » qu’avoir un but dans la vie prolongeait l’espérance de vie !

Cette étude m’a fait sourire, je vous l’ai dit.

D’abord, parce que les Américains ont eu besoin d’une étude menée sur 7 000 personnes pour se convaincre de ce qui me paraît être le bon sens même.

Ensuite, parce qu’ils ont plus de 10 ans de retard sur les scientifiques japonais, qui depuis longtemps s’intéressent aux effets sur la longévité de l’Ikigaï.

Le mot est japonais, mais l’Ikigaï est universel.

L’Ikigaï est communément traduit par « ce qui vous fait vous lever le matin ».

C’est juste… mais très incomplet (j’y reviendrai ensuite).

Pour le moment, ce qu’il est capital de comprendre, c’est que l’Ikigaï est plus efficace pour vous protéger des maladies du vieillissement que… les traitements hormonaux, la télomérase ou les pseudo-produits anti-âge !

En 2008, des chercheurs de l’université de médecine de Tōhoku (sud du Japon), ont réalisé une étude scientifique sur 54 996 personnes, durant sept ans.

Cette étude a permis de mettre pour la première fois en évidence la force d’Ikigaï sur la santé et la longévité.

Les participants à cette étude étaient les bénéficiaires du Centre de Santé Publique de Ōsaki, une agence locale gouvernementale offrant des soins de santé aux habitants de quatorze municipalités, âgés de 40 à 79 ans.

Ces personnes devaient répondre à 93 questions sur :

  • leurs antécédents médicaux et familiaux ;
  • leur état de santé physique ;
  • leurs habitudes de consommation d’alcool et de tabac ;
  • leur emploi ;
  • leur situation familiale ;
  • leur niveau d’études ;
  • et… leur Ikigaï.

La publication de ces résultats, dans la prestigieuse revue de psychiatrie et de psychologie Psychosomatic Medicine[6], prouve quelque chose d’extraordinaire… 

La conclusion de l’étude : « comparés à ceux qui ont développé un sens de l’Ikigaï, ceux qui ne l’avaient pas développé avaient davantage tendance à ne pas être mariés, ne pas avoir d’emploi, avoir un niveau d’études inférieur, un état de santé mauvais ou jugé mauvais par le sujet, un niveau élevé de stress mental, des douleurs physiques modérées à sévères, à souffrir d’une limitation de la condition physique et avoir moins tendance à marcher. »

Mais il y a mieux.

Entre une personne qui déclare avoir un Ikigaï, et une autre qui dit ne pas en avoir, la première a 2 fois moins de risque de mourir dans les 7 ans à venir !

« Les sujets qui n’avaient pas trouvé un sens de l’Ikigaï avaient un risque de mortalité de toute cause augmenté » !

La plus belle réponse à l’arrogance des apprentis sorciers de l’anti-âge

Personnellement, je trouve ça très beau, et rassurant.

Très beau et rassurant qu’une valeur humaine soit plus efficace que des traitements hormonaux pour vivre plus longtemps. 

Très beau et rassurant qu’un mode de vie millénaire soit plus efficace que des techniques médicales « de pointe » pour tenir éloignée la maladie.

Très beau et rassurant que la clé d’une vieillesse en bonne santé se trouve dans votre tête et votre cœur, pas dans des traitements douteux et coûtant cher.

C’est à mes yeux un contresens de débourser des centaines, des milliers d’euros dans l’espoir vain de « régénérer » les cellules de l’organisme par des méthodes sophistiquées… quand il est plus efficace et moins coûteux de prendre soin de sa santé en s’inspirant des méthodes naturelles qui ont fait leurs preuves depuis des siècles.

Cultiver la vieillesse en bonne santé plutôt que chercher à guérir du vieillissement !

Les « zones bleues », ces régions où les centenaires en pleine forme sont plus nombreux que partout ailleurs dans le monde, nous enseignent en effet que vieillir en bonne santé repose sur des choix de vie qui se déclinent au quotidien :

  • une alimentation particulière ;
  • une activité physique « adaptée » et douce ;
  • une vie familiale et sociale épanouissante ;
  • un Ikigaï développé.

Je vous en dirai plus dans mes prochains messages, en abordant notamment l’exemple des champions du monde de la longévité.

Portez-vous bien,

Rodolphe Bacquet

[1] Olshansky (S. J.), Hayflick (L.) et Carnes (B. A.), « Position Statement on Human Aging », The Journals of Gerontology Series A: Biological Sciences and Medical Sciences, vol. 57, no 8,‎ 1er août 2002, pp. B292–B297, (ISSN 1079-5006), consulté en juillet 2019, disponible sur https://doi.org/10.1093/gerona/57.8.b292

[2] Butler (R. N.) et al., « Is There an Antiaging Medicine? », The Journals of Gerontology Series A: Biological Sciences and Medical Sciences, vol. 57, no 9, pp. B333-8, Workshop Report, New York: International Longevity Center – Canyon Ranch Series, 2001, consulté en juillet 2019, disponible sur https://doi.org/10.1093/gerona/57.9.B333

[3] Mehlman (M. J.), Binstock (R. H.), Juengst (E. T.), Ponsaran (R. S.) et Whitehouse (P. J.), « Anti-Aging Medicine: Can Consumers Be Better Protected? », The Gerontologist, vol. 44, no 3, 1 juin 2004, pp. 304–310, consulté en juillet 2019, disponible sur https://doi.org/10.1093/geront/44.3.304

[4] Wang (J.), Hannon (G. J.) et Beach (D. H.), « Risky immortalization by telomerase », Nature, 2000, vol. 405, pp. 755-756, consulté en juillet 2019, disponible sur https://www.nature.com/articles/35015674

[5] Olshansky (S. J.), Hayflick (L.) et Carnes (B. A.), « Position Statement on Human Aging », The Journals of Gerontology Series A: Biological Sciences and Medical Sciences, vol. 57, no 8,‎ 1er août 2002, pp. B292–B297, (ISSN 1079-5006) disponible sur https://doi.org/10.1093/gerona/57.8.b292

[6] Sone (T.)et al., « Sense of Life Worth Living (Ikigai) and Mortality in JapanOhsaki Study», Psychosomatic Medicine, vol. 70, no 6, pp. 709-715, consulté en juillet 2019, disponible sur https://doi.org/10.1097/PSY.0b013e31817e7e64