Chers amis,

Une affaire a fait grand bruit en Normandie, il y a quelques semaines.

Une patiente souffrant d’un cancer et sous traitement était venue voir son médecin avec trois questions.

Mais, sitôt la première question traitée par le généraliste, ce dernier mit fin à la consultation, en lui indiquant la « règle » qu’il avait affichée dans son cabinet : « un motif par rendez-vous » !



La patiente fut contrainte de reprendre un rendez-vous une semaine plus tard afin d’aborder les autres sujets pour lesquels elle venait, notamment des problèmes de diarrhée provoqués par son traitement anticancer[1]. 

Cette affaire a légitimement scandalisé l’opinion publique locale : chasser de son cabinet une patiente cancéreuse parce qu’elle « ose » poser plusieurs questions à son médecin !

« Oui, mais Rodolphe, il s’agit d’un cas isolé, vous ne pouvez pas généraliser ! »

Eh bien attendez, car l’histoire n’est pas terminée.

Suite à ce récit sur des sites professionnels de médecins, plusieurs d’entre eux ont dénoncé l’inhumanité de ce confrère… mais la majorité des généralistes ont pris fait et cause pour ce médecin[2].

Ces médecins dénoncent les salles d’attente combles, la gestion de leur patientèle en l’absence de secrétariat, la faiblesse de leur rémunération (25 euros) par rapport à ce qu’attendent d’eux leurs patients.

Des confrères félicitent même ce médecin d’être « sur le bon chemin ».

On peut être choqué par de tels propos, et je l’ai été. Je m’efforce de les comprendre : ils dénoncent des conditions de travail éprouvantes, et même le « consumérisme » de leurs patients.

Mais le problème n’est-il pas plutôt dans notre rapport « docteur/patient » ?

Si l’on sortait du rapport « docteur/patient » ?

Depuis des décennies la majorité d’entre nous appliquons aveuglément le système « docteur/patient ».

Ce système est profondément ancré dans nos mœurs, dans notre imaginaire.

J’ai un problème de santé : c’est le médecin qui va poser des mots sur ce dont je souffre (le diagnostic) et me soigner (le traitement).

Le docteur est, comme son nom l’indique, « docte ». C’est le savant, le sachant. C’est lui qui sait.

Le patient vient le voir dans une humble posture : il a besoin de son savoir, pour espérer guérir et aller mieux.  

Cette relation d’autorité entre « celui qui sait, et soigne » d’un côté et « celui qui ne sait pas, et a besoin de soins » de l’autre, est l’alpha et l’oméga de notre système de santé actuel

Elle semble logique et justifiée : le médecin a fait de longues et pénibles années d’étude – en moyenne dix ans – et a accumulé un certain niveau d’expérience dans sa « spécialité ».

Mais ce savoir et cette expérience, qui justifient qu’on vienne le voir et qu’on l’appelle « docteur », justifient-ils forcément ce rapport de maître à élève ? 

Ce rapport est en réalité culturel, et récent.

Chine ancienne : le médecin n’était payé qu’en l’absence de maladie !

Dans la Chine ancienne par exemple, les médecins devaient également faire de longues études pour avoir le droit d’exercer.

Néanmoins, les rapports entre les médecins et leur « patientèle » étaient radicalement différents.

Un médecin n’était payé, en effet, que si son patient était en bonne santé !

Si le patient tombait malade, c’est que le médecin avait mal fait son travail.

Dans son ouvrage Médecine du monde, Claudine Brélet explique ainsi : 

« La médecine taoïste (…) est de nature préventive en aidant l’être humain à résister aux agressions extérieures et à s’adapter à ses propres déséquilibres internes, bien que pouvant « réparer » si besoin est. L’être humain est cependant responsable de sa santé[3]. »

Puis, plus loin :

« Lorsque cet équilibre est réalisé, l’homme ne souffre ni de désordre, ni d’affliction, ni de maladie. Cette médecine est donc avant tout préventive, prophylactique, car elle comprend un ensemble de mesures destinées à éviter ou empêcher l’apparition ou le développement d’une ou de plusieurs maladies. C’est pourquoi les empereurs ne rétribuaient leur médecin que lorsqu’ils restaient en bonne santé…[4] »

Nous sommes évidemment à des années-lumière d’une telle relation aujourd’hui en Occident.

La relation « médecin/patient » est aujourd’hui en train de connaître une très inquiétante dérive.

Car ce rapport de pouvoir peut être respectueux, mais il peut aussi être condescendant, voire méprisant.

Le récit de la patiente « expulsée » du cabinet de son médecin en Normandie en est la terrible illustration.

Et si on arrêtait de tout attendre de notre médecin ?

D’un côté, nous avons donc des patients qui se plaignent de n’avoir plus le temps d’être écoutés, de consultations effectuées à toute vitesse où leurs problèmes de santé sont survolés.

De l’autre, de nombreux médecins qui frôlent le burnout, se sentent dépassés et mal récompensés pour leur dévouement. 

Remettre en question ce rapport docteur/patient est la première chose à faire, j’en suis convaincu.

Pour deux raisons capitales. 

1 : ne soyez ni passif, ni victime

Tout attendre d’un médecin – ou de toute autre thérapeute – est non seulement le placer, lui, sur un piédestal, mais se placer soi, dans une position passive.

Cela consiste à « subir » le diagnostic et le traitement… exactement tout comme l’on subit la maladie. 

C’est, pour le dire autrement, se placer en position de victime qui attend d’être secourue.

Dans son passionnant livre Les 9 Clés de la rémission, consacré aux cas de guérisons spectaculaires de cancer, la chercheuse Kelly Tuner liste plusieurs points communs entre les « miraculés » du cancer. 

Je parle de « miraculé »… mais c’est aux yeux de la science. Car aux yeux des patients concernés, il s’agit au contraire du fruit d’un long travail de leur part.

Vous m’avez compris, le point commun de toutes ces personnes ayant survécu à des pronostics très pessimistes de cancer ont pris leur santé en main. 

Ils ont décidé de ne plus « attendre » ni solution toute faite ni traitement miraculeux de la part de leurs médecins.

Et c’est cette démarche volontaire qui a constitué leur premier pas vers la guérison : ils sont sortis de la relation de dépendance que la plupart d’entre nous avons vis-à-vis de l’autorité médicale.

Faut-il pour autant se passer de médecin ? Évidemment non !! C’est ce qui m’amène à la seconde raison.

2 : choisissez des thérapeutes avec lesquels vous pouvez dialoguer

Aucun médecin, aucun thérapeute, ne devrait être une machine à signer des ordonnances et distribuer des médicaments.

C’est, malheureusement, ce que beaucoup de médecins aujourd’hui font dans les faits. Par manque de temps le plus souvent et – c’est plus grave – par absence de vocation.

Un très bon médecin me confiait qu’à l’issue d’une journée de consultations, l’interne qu’il avait accueilli auprès de lui en stage lui avait dit : « mais comment faites-vous pour écouter tous ces gens se plaindre toute la journée ? C’est insupportable ! ».

Réponse de ce médecin : « si vous trouvez ça insupportable il faut songer à changer de voie : c’est la base de notre métier ! ».

Il a raison.

Un bon médecin écoute d’abord son patient, car si le médecin sait, a le savoir encyclopédique de ses années d’études, c’est le patient qui sait le mieux ce qui lui arrive, à lui.

Et c’est parce qu’il l’écoute, qu’il est capable de lui donner des réponses pertinentes et de l’orienter vers la bonne voie thérapeutique.

Autrement dit, le rapport docteur/patient devrait être bel et bien basé sur le dialogue et le conseil.  

Cela vaut pour les médecins, mais aussi les naturopathes, les spécialistes, etc. 

Chaque thérapeute que l’on consulte est une étape que l’on fixe sur son propre chemin de guérison. Elle n’est pas la guérison elle-même !

Si vous souhaitez aller plus loin dans cette démarche qui consiste à redevenir maître de votre santé, surveillez bien votre boîte à lettres car je vais bientôt vous présenter quelqu’un qui peut vous y aider de façon spectaculaire.

Portez-vous bien,

Rodolphe Bacquet 


[1] Pujeolle, K. (04.06.2021). Dans L’Orne, « un motif par rendez-vous » selon ce médecin : la patiente privée d’ordonnance. Actu.fr, L’orne hebdo. https://actu.fr/normandie/alencon_61001/dans-l-orne-un-motif-par-rendez-vous-selon-ce-medecin-la-patiente-privee-d-ordonnance_42401129.html

[2] https://www.egora.fr/actus-pro/ca-vous-a-fait-reagir/67117-un-motif-par-rendez-vous-derive-ou-survie-du-generaliste#xtor=EPR-3-2%5BNews_a_la_Une%5D-20210619-%5B_1%5D

[3] Brélet, C. (2006). Médecines du monde. Robert Laffont, p.735

[4] Idem, p.750