Chers amis, 

Dans la foulée de la lettre Alternatif Bien-Être que j’ai consacrée aux courses alimentaires en temps de confinement, où je vous expliquais l’intérêt des produits frais à préférer aux boîtes de conserve, et aux paquets de pâtes et de riz, la journaliste Pryska Ducoeurjoly, qui collabore chaque mois à la revue Alternatif Bien-Être, partage avec vous sa liste des aliments à avoir dans ses placards en temps de confinement.

Cette liste est extraite d’un article plus long qui sera publié dans le numéro 164 d’Alternatif Bien-Être, sur lequel nous sommes en train de travailler. Mais il nous a paru important de pouvoir vous faire profiter des conseils de Pryska dès maintenant.

Portez-vous bien,

Rodolphe Bacquet


La choucroute crue

Le chou est avant tout une très bonne source de vitamine C et de calcium. Il contient également des vitamines du groupe B (principalement B9), du potassium, du fer et du magnésium. Sous sa forme lacto-fermentée, c’est une vraie bombe de probiotiques. Ces bactéries amies qui composent la flore intestinale jouent un rôle déterminant dans le système immunitaire. Notre flore intestinale nous aide aussi à digérer les aliments et à fabriquer certains nutriments. La choucroute crue améliore ainsi la biodisponibilité de certaines molécules comme la vitamine B, le magnésium ou encore le zinc, un anti-infectieux et antioxydant très important. Par ailleurs, nos intestins constituent notre deuxième cerveau. Une bonne flore intestinale entretenue par la consommation régulière d’aliments fermentés (ce qui inclut des produits à base de soja ou d’autres légumes) permet de mieux gérer le stress et prévenir la dépression.[1] La choucroute crue est un aliment vivant, donc plus propice à maintenir notre vitalité, avec des enzymes, des antioxydants et des agents anti-inflammatoires. « Présente au XVIIIe siècle à bord des bateaux de traversées, elle a permis de lutter contre le scorbut grâce à sa teneur exceptionnelle en vitamine C. Une portion couvre quasiment les 2/3 de nos besoins quotidiens en cette précieuse vitamine », rappelle le site doctissimo.fr.[2]

Les huiles d’olive et colza de première pression à froid

Afin de subvenir à vos besoins en acides gras essentiels, et notamment en oméga-3, mélangez ces deux huiles à part égale. Vous obtiendrez ainsi une proportion idéale entre les acides gras monoinsaturés (oméga-9) et les acides gras polyinsaturés (oméga-3, oméga-6). Naturellement riche en oméga-9 (55 à 83 %), l’huile d’olive a fait le succès du régime méditerranéen. Reconnue pour ses vertus anticancer et pour la prévention cardiovasculaire, on peut la consommer sans modération comme assaisonnement et pour la cuisson. Veillez à ne pas la laisser partir en fumée car elle contient tout de même des oméga-6 et 1 % d’oméga-3. Elle apporte de nombreuses vitamines : E, D, K, provitamine A, des polyphénols, des phytostérols, de la chlorophylle et du sélénium. Quant à l’huile de colza, outre le fait qu’elle est peu onéreuse, une cuillère à soupe vous apportera votre dose quotidienne en oméga-3 (9 %). Elle contient aussi une forte proportion d’oméga-9 (60 %). L’huile de colza contient 10 fois plus de vitamine E que l’huile d’olive. C’est un antioxydant majeur qui protège aussi les oméga-3 présents dans l’huile. Un autre antioxydant, le canolol, a récemment été découvert dans l’huile de colza non raffinée, raison de plus pour la choisir avec la mention « vierge et première pression à froid ». Réservez cette huile aux vinaigrettes car il ne faut surtout pas la faire chauffer. Vous pouvez aussi alterner avec une huile de noix qui contient jusqu’à 15 % d’oméga-3, mais aussi 55 % d’oméga-6, un ratio inférieur à 4 qui reste intéressant. Elle contient environ 20 % d’oméga-9. Dépourvue d’acides gras saturés, elle est fragile. Veillez à bien la conserver au frais.

La morue salée

La morue est en fait issue du cabillaud, un grand poisson qui vit dans les mers et océans froids. Elle contient beaucoup d’acides gras essentiels à longue chaîne (EPA et DHA). Ces derniers, qui appartiennent à la famille des oméga-3, ne sont pas toujours synthétisés correctement à partir des aliments végétaux. Les EPA et DHA sont particulièrement recommandés dans la prévention des maladies cardiovasculaires et sont nécessaires au développement et au fonctionnement de la rétine, du cerveau et du système nerveux. Ils contribuent aussi au bon fonctionnement des systèmes immunitaire, circulatoire et hormonal. Ces acides gras exercent des effets anti-inflammatoires, utiles dans la prévention de pathologies comme l’asthme, l’arthrite rhumatoïde, les maladies inflammatoires de l’intestin et le psoriasis.

Si je vous propose ce produit traditionnel portugais, c’est aussi parce qu’il se conserve un an grâce au sel (12–14°, soit l’équivalent d’une cave) et qu’il fournit des protéines de bonne qualité. Celles-ci sont nécessaires pour la santé des tissus, comme la peau, les muscles et les os.

Oui, mais quid du problème des métaux lourds ? Dans un précédent dossier consacré au poisson (voir Alternatif Bien-Être n°153), je vous proposais certains antidotes naturels. Il faut d’abord veiller à entretenir sa flore intestinale (avec des aliments riches en probiotiques comme la choucroute) et consommer régulièrement des antioxydants (sélénium, zinc, vitamine A, C et E). Cela tombe bien, car le cabillaud en contient déjà. Ces précautions prises, vous pouvez pleinement profiter des bienfaits de ce produit de la mer, source de minéraux (calcium, magnésium, phosphore), d’oligo-éléments (iode et surtout sélénium), de vitamines B (notamment la B12 : 100 g couvrent 90 % de nos besoins quotidiens) et de vitamine D (100 g de morue couvrent 25 % de nos besoins quotidiens). Cette dernière est précieuse pour la santé osseuse, le système immunitaire, la prévention du cancer ou de la dépression. Par ailleurs, la vitamine D est un remède émergent pour le traitement et la prévention du coronavirus. Avant de préparer la morue, il faut la dessaler pendant 24 à 36 heures dans plusieurs eaux très froides. Elle va alors doubler de volume. Essayez de vous rapprocher d’une épicerie portugaise qui peut proposer de très bons prix, environ 12 € le kilo, si vous en prenez en assez grande quantité. 

La moutarde et autres condiments

On pourrait croire que la moutarde est un aliment superflu, alors qu’elle est en réalité un alicament. Elle possède en effet des propriétés très intéressantes. Elle contient un composé anti-bactérien, anti-fongique et anti-cancérigène[3] : l’isothiocyanate d’allyle. C’est une molécule soufrée de la famille des glucosinolates, au goût piquant, présente dans les crucifères (roquette, raifort, navet, radis…). Avec ses composés soufrés, la moutarde donne aussi un coup de pouce à la détoxification hépatique.

Par voie interne, la moutarde favorise la digestion à tous les niveaux. Mais si vous souffrez de brûlures d’estomac ou d’ulcère, mieux vaut ne pas en abuser. Par voie externe, la moutarde favorise la circulation du sang, son action hyperémiante lui permet de soulager de nombreux maux. En provoquant une réaction locale, elle décongestionne et soulage les inflammations (rhumes, bronchites, névralgies, rhumatismes, maux de tête et douleurs menstruelles). Parmi les remèdes de grand-mère, il y a bien sûr les cataplasmes à la moutarde, ou sinapisme. On peut les réaliser chez soi : mélangez une cuillerée à soupe de moutarde avec 20 cl d’eau tiède, étalez ce liquide dans une gaze, et laissez poser 10 minutes sur la peau préalablement hydratée. En cas de brûlure ou d’irritation, mieux vaut retirer le cataplasme, le mieux étant de faire un test cutané auparavant. On l’utilise aussi bien pour les problèmes bronchiques que pour les problèmes musculaires et articulaires. J’ai aussi trouvé une recette contre les maux de gorge : une cuillère à soupe de moutarde, de sel, de miel et le jus d’un demi-citron dans une tasse d’eau bouillante. On laisse un peu refroidir et on procède à un gargarisme. Je vous conseille de privilégier la moutarde de Dijon qui garantit une recette très basique : de l’eau, des graines broyées, du vinaigre, du sel, et c’est tout.

Parmi les autres condiments à privilégier : les algues séchées, l’ail et le curcuma. Ce sont des super-aliments (antioxydants, reminéralisants, anti-cancer, riches en vitamines). Vous pourrez vous préparer un petit tartare[4] à haute densité nutritionnelle avec ces ingrédients, en ajoutant simplement un filet de citron et de l’huile. Achetez des algues séchées que vous pourrez réhydrater facilement (nori, wakamé, dulce, etc.) et des tubercules de « curcuma longa », que vous pourrez cultiver chez vous en ayant pris soin de vous renseigner sur la meilleure méthode[5].

Enfin, toujours au chapitre des condiments, optez pour le sel marin non raffiné, qui présente un bon équilibre en minéraux et oligo-éléments. Vous pouvez aussi saler avec de la sauce de soja fermentée (bio). 

Les graines oléagineuses et les fruits secs

Faites quelques provisions en noix, noisettes, amandes, tournesol, sésame, lin. Les oléagineux sont très riches en acides gras essentiels (oméga-9, 6, 3). Ils sont une très bonne source de vitamines E et du groupe B, mais aussi de calcium, phosphore, magnésium, cuivre, manganèse, fer… Ils contiennent différents composés antioxydants : tannins, acides phénoliques, flavonoïdes (polyphénols). Ils sont aussi une excellente source de protéines végétales. Ces protéines sont moins acidifiantes que celles d’origine animale. Les oléagineux en contiennent en moyenne 20 g/100 g. Je vous conseille de faire pré-germer les graines de tournesol, amande et noisette pour en potentialiser les bienfaits. Pour les fruits à coque, mieux vaut les acheter dans leurs enveloppes, même si c’est un peu fastidieux à casser, car ils seront mieux préservés de l’oxydation. Faites aussi un stock de raisins secs car, outre le fait qu’ils sont bon marché, ils condensent de nombreux oligo-éléments tels que le calcium (os), le fer (contre l’anémie), le magnésium (stress), ou encore le potassium (hypertension). Ils sont également une excellente source de vitamines et de fibres. Comme la plupart des fruits, ils vous apporteront des antioxydants pour lutter contre la fatigue. Ils agrémenteront aussi très bien la choucroute crue avec une pomme et quelques oléagineux.

Légumineuses, quinoa et sarrasin

Pour veiller à vos apports en protéines végétales, vous pouvez bien sûr choisir des légumineuses comme les lentilles, les haricots secs et les pois chiches. Comme la plupart des aliments cités plus haut, les légumineuses contiennent bon nombre d’oligo-éléments et de minéraux, ainsi que des fibres. N’oubliez pas que vous pouvez aussi les consommer en tant que graines germées, un véritable alicament. Pour la cuisson, il est important de les faire tremper 12 heures avant pour éliminer l’acide phytique, un anti-nutriment.

Un peu moins riches en protéines mais non moins intéressants, car proposant les huit acides aminés essentiels, il y a le quinoa et le sarrasin. Ces deux aliments ne contiennent pas de gluten. J’insiste particulièrement sur le sarrasin, car cette plante apporte des fibres dites prébiotiques, qui nourrissent la flore intestinale.[6] Le sarrasin est peu calorique, favorise le sentiment de satiété et possède des vertus anticancer, anticholestérol, hypoglycémiantes et anti-obésité.

Les légumes longue conservation

Les courges et potimarrons peuvent se conserver jusqu’à six mois lorsqu’ils sont stockés au sec, bien espacés et si possible dans une atmosphère tempérée (et non dans une cave). Surtout, ne coupez pas leur pédoncule, ne les blessez pas et surveillez-les régulièrement : dès qu’une tâche suspecte apparaît, consommez-les ! Vous pouvez les cuisiner crus (rapés) ou cuits. Les courges peuvent aussi être congelées. Elles contiennent de nombreuses molécules bénéfiques à la santé : alcaloïdes, flavonoïdes, acides linoléique, oléique, palmitique. La citrouille possède des propriétés anti-diabétiques, anti-cancéreuses et anti-inflammatoires.[7]

J’attire aussi votre attention sur l’oignon, un super-aliment de longue conservation. Un oignon de taille normale fournit 13 % de l’apport quotidien recommandé en vitamine C, en plus de la vitamine A, du sélénium et d’autres antioxydants (antocyanes, polyphénols). Il contient aussi de la quercétine (surtout dans l’oignon rouge), un flavonoïde stimulant l’immunité. C’est un antiviral à large spectre, c’est pourquoi il entre dans l’arsenal de lutte contre les coronavirus[8]. L’oignon est réputé pour réduire les symptômes de bronchite, pharyngite, rhume et autres affections respiratoires. Pour les conserver, il faut entreposer vos oignons dans un endroit sec, ventilé et sombre. Ils pourront ainsi tenir jusqu’à huit mois. Pour les carottes, riches en bêtacarotènes (vitamine A), il faut vous procurer des carottes qui ne sont pas lavées et que vous stockerez dans une caisse avec du sable sec et de la terre sèche dans un endroit sec et sombre. Un mot enfin sur les pommes de terre, qui vous apporteront simplement des glucides : il vaut mieux les entreposer non lavées dans un endroit frais, sombre, ventilé et à distance des fruits. Éliminez celles qui présentent des blessures pour éviter qu’une moisissure ne vienne contaminer votre stock. Cette vérification est à faire au moins une fois par mois.

Pryska Ducoeurjoly

[1] « Contre le stress et la dépression, choucroute et aliments fermentés », par Lanutrition.fr, publié le 25/02/2014, citant une étude de Eva M Selhub et al. « Fermented foods, microbiota, and mental health: ancient practice meets nutritional psychiatry. » Journal of Physiological Anthropology 2014,

[2] « La choucroute : un aliment minceur aux multiples vertus », 02 février 2011.

[3] Conaway CC, Yang YM, Chung FL. « Isothiocyanates as cancer chemopreventive agents: their biological activities and metabolism in rodents and humans ». Curr Drug Metab 2002 June.

[4] vegan-pratique.fr/recettes/tartare-dalgues-cru-vegan/

[5] www.consoglobe.com/planter-curcuma-chez-soi-bons-gestes-cg

[6] Des chercheurs ont constaté que des animaux recevant une alimentation à base de sarrasin voyaient leurs bactéries lactiques et leurs bifidobactéries augmenter. Voir l’article “sarrasin” sur passeportsante.net.

[7]  “Les vertus santé de la courge”, lanutrition.fr, 18/02/2008

[8]  J Virol. 2004 Oct. “Small molecules blocking the entry of severe acute respiratory syndrome coronavirus into host cells.”